Entrée dans le supérieur en septembre 2021 :
que sait-on ?

La réforme en cours du lycée aura forcément un impact sur la liaison avec l’enseignement supérieur. Mais lequel ? Alice Ernoult fait le point pour nous.

Alice Ernoult, pour la commission « Enseignement supérieur »

© APMEP Décembre 2020

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Les bachelières et bacheliers qui entreront dans l’enseignement supérieur en septembre prochain seront, au moins pour ceux de la voie technologique et de la voie générale, les premiers titulaires du nouveau bac. Leur formation dans le secondaire aura été marquée par la réforme du collège à leur entrée en 4e, la réforme du lycée et son choix de spécialités pour leur entrée en Première, puis en Terminale. Parmi les éléments qui peuvent concerner leur poursuite d’études soulignons quelques points, notamment pour la voie générale.

Rappelons qu’en voie générale il n’y a désormais plus les séries ES, L et S mais un tronc commun, des spécialités (trois en Première, dont deux à poursuivre en Terminale) et, éventuellement, des options. Pour le baccalauréat, seules les spécialités donnent lieu à des épreuves nationales. Le tronc commun est évalué en contrôle continu et par des « épreuves communes » en Première et en Terminale avec des sujets issus d’une banque d’épreuves. Quant aux options, celles de mathématiques en tout cas, elles ne sont prises en compte que par les notes mises dans les bulletins.

Du point de vue des mathématiques, cinq parcours sont désormais possibles au lycée général : arrêt en fin de Seconde, choix de la spécialité en Première puis arrêt en Terminale (avec choix de l’option « mathématiques complémentaires » en Terminale ou non), choix de la spécialité jusqu’en Terminale (avec choix de l’option « mathématiques expertes » en Terminale ou non).

On peut voir des aspects positifs à cette organisation : dans la filière S, de très nombreux élèves suivaient l’enseignement de mathématiques un peu sous la contrainte ; celles et ceux qui poursuivent aujourd’hui l’enseignement de spécialité jusqu’en fin de Terminale l’ont certainement choisi de manière plus positive. Autre point positif, il est maintenant possible de renforcer encore son horaire de mathématiques grâce à l’option « mathématiques expertes » sans devoir renoncer à autre chose (comme lors des anciens choix de spécialités).

En revanche, les élèves qui ont un goût prononcé pour les sciences doivent faire des choix bien difficiles parfois : choisir « physique-chimie » et « numérique et sciences informatiques » exclut la possibilité de suivre la spécialité mathématiques en Terminale (et c’est la même chose pour tout autre binôme de spécialités). L’option « mathématiques complémentaires » a été proposée entre autres pour pallier cette difficulté… mais elle est aussi adaptée à des élèves souhaitant suivre plutôt un parcours de sciences humaines, de médecine, ainsi qu’aux indécis, etc. On peut donc s’attendre à ce qu’une partie des élèves aient effectivement un profil plus solide en mathématiques, pendant que d’autres auront au contraire des acquis bien plus fragiles. Il y aurait beaucoup à dire encore sur cette réforme, dans les voies technologique et professionnelle aussi. De nombreux textes sont disponibles sur le site de l’APMEP sur ces sujets…

Concentrons-nous maintenant sur ce que nous savons (ou pas) de la rentrée 2021 dans l’enseignement supérieur.

Pour les Sections de Techniciens Supérieurs… nous n’avons aucune information. Est-ce qu’il y aura une prise en compte de la baisse drastique (pour ne pas dire dramatique) des enseignements généraux dans la voie professionnelle ? Les programmes ne seront vraisemblablement pas modifiés pour la rentrée 2021 (nous n’avons en tout cas connaissance d’aucun travail en ce sens en cette mi-octobre). Quant aux modalités de recrutement, il faudra certainement compter sur une information partagée localement par chaque lycée accueillant des STS.

Les Instituts Universitaires de Technologie auront désormais pour vocation à proposer une formation en trois ans correspondant à une Licence professionnelle (appelée bachelor universitaire de technologie ou BUT), le diplôme universitaire de technologie (DUT) pouvant toujours être délivré comme diplôme intermédiaire, au bout de deux années sur les trois prévues pour la formation complète.

Le texte régissant ces Licences professionnelles particulières , prévoit un quota de 50 % de bacheliers technologiques dans ces formations. Ce même texte donne le cadre pour les horaires d’enseignements mais nous ne disposons pas, à ce jour, de plus d’informations. Quant à l’adéquation entre la formation suivie au lycée et les IUT, aucune information précise n’est diffusée de manière officielle. Il y a bien des raisonnements de « bon sens » assez aisés (n’avoir aucune spécialité scientifique pour entrer en IUT « Mesures Physiques » ne paraît pas très raisonnable par exemple), mais il est impossible de savoir comment seront faits les choix des commissions de recrutement avec précision. Sur ces sujets, on peut consulter le site officiel du réseau des IUT (aucune mention n’est faite de la réforme du lycée) et le blog1 de Julien Gossa .

Pour les Licences, l’adaptation des programmes dépend de chaque université. Le recrutement aussi bien entendu. Jusqu’à présent, pour les programmes des Licences scientifiques, le programme de référence au lycée était celui de la Terminale S… sur quoi s’appuyer aujourd’hui ? Le programme de spécialité Mathématiques ? Celui de « mathématiques complémentaires » ? Celui de la spécialité mais en Première seulement ? … et le même genre de questions se posent aussi en physique et en informatique notamment. Comment accueillir au mieux un vivier d’étudiants suffisamment vaste, comment ne pas ennuyer ceux qui auront déjà des acquis, tout en permettant aux autres de suivre ? La diversité des profils, si elle peut être une richesse à certains moments, sera forcément un casse-tête pour l’écriture des programmes et contenus d’enseignement. Au sein de la commission « enseignement supérieur » de l’APMEP, des enseignants-chercheurs nous ont déjà fait part de leur volonté de s’adapter au mieux. Mais que pourront-ils faire en quelques mois, sans visibilité sur le recrutement réel et sans moyens supplémentaires pour faire face à l’explosion de l’hétérogénéité ?

Dans l’ensemble du paysage de l’enseignement supérieur, les classes préparatoires aux grandes écoles sont certainement les formations qui ont fait l’objet d’un travail plus précis d’adaptation au nouveau lycée ; ce sont aussi les formations qui étaient les plus explicitement et officiellement adossées aux filières du lycée. Rappelons qu’il existe un enseignement de mathématiques dans les filières scientifiques (MPSI bien sûr, PCSI, PTSI, TSI, BCPST, TB), mais aussi économiques (ECE, ECS, ECT, D2, en option en D1) et littéraires (B/L). À notre connaissance, les filières B/L, D1 et D2 ne subiront pas (ou très peu) de transformation suite à la réforme du lycée. Quant à leur recrutement, ce sont des filières plutôt rares, mieux vaut se rapprocher directement des établissements concernés, les critères pouvant légèrement varier d’un établissement à l’autre.

Les classes préparatoires économiques vont connaître de fortes modifications : de programme en ECT, pour continuer d’être dans le prolongement de la terminale STMG ; de structure et de programmes pour les ECE et ECS. Ces deux dernières seront regroupées en une seule filière nommée ECG (économique et commerciale option générale), avec théoriquement quatre parcours possibles et notamment deux enseignements de mathématiques bien distincts. Les programmes de ces deux enseignements ne sont pas du tout connus à l’heure où nous écrivons cet article, la seule information dont nous disposons c’est qu’il est recommandé (pour ne pas dire obligatoire), d’avoir suivi un enseignement de mathématiques jusqu’en fin de Terminale pour réussir dans cette filière. Pour le moment, nous ne savons pas quel parcours sera proposé dans quel lycée. Il est peu probable que les structures existantes soient systématiquement déstabilisées ou modifiées, mais dans le détail il pourrait y avoir des changements.

Les classes préparatoires de biologie, en particulier la filière BCPST, devraient connaître des changements importants elles aussi. Les écoles vétérinaires ont en effet annoncé qu’elles souhaitent ouvrir une voie parallèle de recrutement et baisser leurs exigences en mathématiques… ce qui n’est en revanche pas le cas des écoles d’agronomie.

Pour les autres filières, de nouveaux programmes sont en cours d’écriture (ou plus précisément en attente de validation depuis quelques mois déjà) mais surtout, une nouvelle filière va être créée : MP2I (Mathématiques, Physique, Informatique et Sciences de l’Ingénieur). Là encore, nous ne savons pas pour le moment où seront ouvertes ces classes. La diversité des disciplines impliquées dans cette formation laisse penser que, si les mathématiques sont une spécialité nécessaire pour y réussir, l’informatique (NSI) n’y sera certainement pas exigée.

Cet article peut paraître bien étrange… pourquoi écrire pour dire qu’on ne sait pas ? D’abord, ce fait est une information à part entière. Ensuite, il nous paraissait important que chacun sache que des réformes sont en cours : de nombreux éléments manquants arriveront dans les prochaines semaines ou les prochains mois. Le savoir permet de rester en alerte sur ces sujets. Enfin, vous disposez peut-être de plus d’éléments que ceux qui sont exposés ici. Si c’est le cas, n’hésitez pas à nous écrire ! La commission « enseignement supérieur » va s’attacher à suivre la préparation de la rentrée 2021 : nous publierons toutes les informations recueillies sur le site de l’APMEP .

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La commission «Enseignement supérieur» est l’une des commissions de l’APMEP. Elle est ouverte à tous ceux que ces questions intéressent. Pour vous renseigner ou pour la rejoindre, vous pouvez contacter sa responsable Alice Ernoult :


  1. la ligne éditoriale n’est pas neutre du tout, chacun se fera son idée, mais c’est une mine d’informations pour le fonctionnement de l’enseignement supérieur.

Pour citer cet article : Ernoult A., « Entrée dans le supérieur en septembre 2021 : que sait-on ? », in APMEP Au fil des maths. N° 538. 8 février 2021, https://afdm.apmep.fr/rubriques/opinions/entree-dans-le-superieur-en-septembre-2021-que-sait-on/.