Les premiers nombres, on en parle en Petite Section

La verbalisation joue un rôle très important dans l’apprentissage et c’est aussi vrai dans le domaine « Acquérir les premiers outils mathématiques » en cycle 1. Pour faire parler les nombres avec des enfants de trois ou quatre ans, il est nécessaire d’utiliser un matériel de manipulation pour accompagner l’entrée en abstraction. Laurence Le Corf partage quelques pistes à exploiter dans les classes de Petite Section.

Laurence Le Corf

© APMEP Septembre 2023

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Le monstre à compter

Le monstre1 à compter est une mascotte qui favorise des temps de langage. Il est un élément déclencheur qui permet de capter l’attention des plus jeunes lors des activités autour des premiers nombres. Il symbolise le travail autour de la connaissance des nombres et leurs utilisations dans l’emploi du temps: « quand il est là, on va jouer avec les nombres » !

Figure 1. Monstre à compter

Le monstre est un support pour des situations d’apprentissage et de verbalisation des procédures ou des stratégies des élèves. L’enseignant peut le faire « vivre » pour imaginer des situations problèmes dès la Petite Section. Par exemple :

  • dénombrer les éléments (bras / yeux / cheveux / pattes / dents) du monstre affiché ;

  • réaliser une collection dont le cardinal est donné oralement (« ton monstre doit avoir 3 bras ») ou dans le registre analogique (constellations du dé) ou symbolique (écriture chiffrée) ;

  • réaliser une collection équipotente à une collection donnée (mettre autant de bras au monstre que sur le monstre-modèle), mais aussi une collection plus petite ou plus grande qu’une collection donnée (mettre moins / plus de cheveux que sur le monstre-modèle).

Le monstre à compter peut être utilisé au coin regroupement, mais aussi en atelier ou encore laissé à disposition dans un coin de la classe pour des usages autonomes.

Dans la continuité de la mascotte du monstre, une version numérique des monstres à compter est en accès libre sur la classe de Florent.

Figure 2. Monstre à compter numérique

Numicons et Connecting numbers

Faire parler les nombres, c’est aussi être capable de conduire l’enfant à travailler sur les nombres, en particulier sur la manipulation de collections, la décomposition 2 des nombres et leur recomposition. Les Numicons et les Connecting numbers sont, par exemple, des outils intéressants à proposer aux élèves.

Les Numicons

Ce sont dix plaques 3 de couleur en plastique ou en mousse (il existe aussi des versions aimantées) représentant les nombres de 1 à 10.

On peut s’en servir de nombreuses façons différentes dès la Petite Section, avec les premiers nombres.

Figure 3. Numericons

Par exemple:

  • laisser les élèves les manipuler et y glisser le nombre de doigts correspondant au nombre de trous ;

  • faire des dictées de nombres, les enfants plaçant les Numicons au fur et à mesure des nombres entendus ;

  • travailler les décompositions en demandant de « fabriquer 2 ou 3 » à partir de plusieurs Numicons (figure 4).

  • prendre autant de bonhommes (ou autres objets) que de trous, la réserve de bonhommes pouvant être proche ou éloignée du Numicon (figure 5).

Figure 4. Fabriquer « 3 » avec des Numicons.
Figure 5. Bonhommes et Numicons.
Les Connecting numbers

Chaque nombre est représenté par une barre de couleur différente dont la longueur est proportionnelle à la valeur qu’elle représente. Sur une face se trouve l’écriture chiffrée (de 1 à 10) et sur la face opposée la collection de points correspondante.

Ce matériel est idéal pour travailler la décomposition / recomposition des nombres.

Figure 6. Connecting numbers.

Par exemple, on peut demander à de jeunes élèves de :

  • construire une barre identique à la « barre du 2 » (respectivement la « barre du 3 ») en ne prenant que des « barres de 1 » et verbaliser que « un et encore un, ça fait deux », « deux et encore un, ça fait trois » ;

  • construire une barre identique à la « barre du 3 » en n’utilisant que des barres « de 1 » et « de 2 ».

Figure 7. « Un et encore un, ça fait deux. Deux et encore un, ça fait trois » avec des Connecting numbers.

Les villages de nombres

Figure 8. Villages de nombres.

Les élèves réalisent des collections d’objets dont le cardinal est compris entre 1 et 3 et se familiarisent à reconnaître les écritures chiffrées des premiers nombres, souvent à partir de la période 4 de l’année scolaire (mars / avril).

L’enseignant présente le matériel aux élèves et pose les feuilles au sol ou sur la table (selon l’organisation choisie). Il leur annonce que chaque feuille représente le village d’un nombre, qu’ils peuvent identifier par l’écriture chiffrée ou une carte flash (constellations de dés, doigts de la main).

Chaque élève regroupe dans son village des collections d’objets de même cardinal en allant, avec son panier, chercher le matériel dont il a besoin. Lorsqu’il a terminé, un échange oral avec ses pairs et / ou l’enseignant est engagé pour valider (ou pas) le village. Ensuite, il peut faire un autre village.

Pour différencier, l’enseignant peut demander de mettre des objets de la même couleur ou non, ou encore varier le nombre de collections à réaliser. Il peut aussi éloigner le matériel à aller chercher, autoriser plusieurs déplacements ou un seul, ou encore demander à l’élève de passer sa commande en l’oralisant.

L’application « 10 doigts »

Le numérique est aussi un excellent outil pour faire parler les nombres en maternelle. L’enseignant peut, par exemple, utiliser en classe l’application « 10 doigts » de Marbotic.

Elle « permet aux élèves de maternelle de découvrir de manière intuitive et avec la seule aide de leurs doigts, les nombres de 1 à 10. Le principe est simple : un nombre ou une collection d’objets apparaît à l’écran. L’élève doit alors poser sur celui-ci le nombre de doigts correspondant à ce nombre » [1].

Des pistes pédagogiques sont proposées dans le livret de l’enseignant disponible gratuitement en ligne.

Figure 9. Application « 10 doigts ».

L’usage des tablettes facilite l’approche des nombres car il implique de toucher avec les doigts de la main l’écran, d’écouter le nom des nombres et de travailler la décomposition / recomposition.

Pour conclure…

Pour faire parler les nombres dès la Petite Section de maternelle, l’utilisation d’un matériel adéquat peut être efficace et permettre de manipuler-verbaliser-abstraire, enjeu majeur pour comprendre et assimiler les concepts mathématiques. Évidemment, « le matériel de manipulation est un moyen, pas une fin car il ne porte pas en lui le concept. Le matériel de manipulation permet de rendre concret un problème et réduit le fossé entre l’élève et le concept » [2].

Et même si certains élèves de Petite Section sont de « très petits parleurs », il ne faut pas sous-estimer la verbalisation sur les temps d’activités mathématiques, entre l’enseignant et les élèves mais aussi entre pairs.

Références

  1. Pascal Millot. L’application 10 doigts est disponible gratuitement !. Académie de Besançon, numérique circo 25, 2018.
  2. Méthode Heuristique de Mathématiques (MHM). Éléments de réflexion sur la manipulation et la démarche manipuler, verbaliser, abstraire dans l’enseignement des mathématiques à l’école..

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Laurence Le Corf est enseignante à l’école maternelle Curie de Saint-Brieuc (académie de Rennes) et PEMF (Professeur des Écoles et Maître Formateur).


  1. NDLR: un monstre pour faire des maths, ça peut faire peur ? Et bien détrompez-vous: les enfants adorent cette mascotte et entrent volontiers dans les apprentissages numériques avec lui !

  2. L. Le Corf. Décomposition des nombres en maternelle. Au fil des maths. Hors-série N° 1. p. 10-16.

  3. Elles ont été inventées en France, dans les années 30, par Suzanne Herbinière-Lebert.

Pour citer cet article : Le-corf L., « Les premiers nombres, on en parle en Petite Section », in APMEP Au fil des maths. N° 549. 21 novembre 2023, https://afdm.apmep.fr/rubriques/eleves/les-premiers-nombres-on-en-parle-en-petite-section/.

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