Une rentrée pas comme les autres au lycée
Réforme oblige, la commission Lycée de l’APMEP s’est réunie plusieurs fois depuis la rentrée scolaire. Vous trouverez dans ce texte l’état des travaux et réflexions, suite à la table ronde des Journées Nationales1 en présence de MM. Yebbou et Roser, inspecteurs généraux et copilotes des projets de programmes. Vos réactions seront les bienvenues !
Commission Lycée de l’APMEP
© APMEP Décembre 2018
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Précisons en préambule un point important : à l’heure où nous écrivons ces lignes, nous n’avons pu consulter que les projets de programmes de mathématiques de 2de générale et technologique, 1re technologique, ainsi que ceux de la spécialité mathématiques en 1re générale, parus quelques jours avant les Journées.
Mardi 2 septembre 2018, nous avons donc accueilli 36 paires d’yeux, fraîchement débarqués du collège, remplis de curiosité souvent, de malice parfois, et d’interrogations toujours : ce sont ceux des premiers bacheliers de 2021. Nous avons peu d’informations à leur donner : ils marchent sur les pas de leurs aînés mais pas complètement ; d’abord, ils vont passer des tests de positionnement, et ensuite, rien ne sera plus pareil : il n’y a plus de filière, ça ils l’ont compris, il y aura un nouveau bac, avec un grand oral, ça, ils l’ont moins compris. Mais surtout, quels enseignements de spécialités s’offriront à eux à la fin de leur Seconde ? Quels seront les impacts de leurs choix sur leur parcours dans le supérieur ? Et comment imaginer, à l’aube de leur parcours de lycéen, qu’ils puissent en prendre la mesure ?
Cette rentrée est un tourbillon qui, en quelques semaines, nous emporte à la fois sur la rentrée 2019, sur la réalité de 2018, et nous projette jusqu’en 2021.
Première rencontre tout d’abord avec les tests de positionnement passés par les élèves de Seconde2 : ceux-ci donnent lieu à un retour individuel pour chaque élève, sans avoir connaissance des items sur lesquels des difficultés ont pu se faire sentir. Difficile alors de mettre en place une remédiation, même si nous apprenons lors de la table ronde que chaque année, un certain nombre d’items seront libérés.
Parallèlement à ceci, la rentrée 2019 se profile : quels enseignements de spécialités seront proposés dans nos établissements ? Bien que la décision soit de la responsabilité du recteur de l’académie, des propositions sont faites en conseils pédagogiques et, pour certains établissements, il semble y en avoir huit, pour d’autres le nombre semble limité à sept… Quelle carte de formation envisager sur un bassin lorsque celui-ci est très étendu sur le territoire ? La spécialité mathématique, les mathématiques expertes et complémentaires en Terminale seront-elles offertes dans tous les établissements ?
Au sujet des enseignements de mathématiques complémentaires ou expertes, enseignements optionnels en Terminale rappelons-le, deux remarques : pour commencer, il ne nous semble pas normal d’imposer aux élèves de suivre des options qui alourdissent leur emploi du temps par rapport aux autres élèves pour certaines poursuites d’études (même si on comprend bien que ces options tentent de combler les manques du tronc commun). Par ailleurs, la mise en place dans les établissements devra se faire sur la « marge » de la dotation horaire, donc au détriment d’autres dispositifs (dédoublement, AP, …). Ces deux points alimentent l’idée que les mathématiques sont une discipline de sélection, réservée à quelques-uns et en concurrence avec les autres disciplines, ce que nous dénonçons.
Et d’un coup, les projets de programmes surgissent dans le paysage, pour consultation puis diffusion des programmes fin janvier 2019, soit neuf mois à peine avant leur entrée en vigueur, ce qui encore une fois, projette violemment sur la rentrée prochaine, sans recul, et sans vision non plus de ce que seront ceux de Terminale. À leur lecture, les intentions sont nettes, en appui sur le rapport Villani-Torossian : en Seconde, l’accent sur calculs, automatismes et démonstration n’est guère dans la continuité des programmes du collège ; en Première, un contenu en nette direction des élèves qui envisagent un cursus scientifique.
Dans ce cas, il reste à espérer que le programme de l’enseignement scientifique du tronc commun offre une vraie formation en mathématiques, et ce pour trois raisons: premièrement, les mathématiques sont ouvertes à tous, chacun peut les vivre et y développer son esprit ; proposons, et c’est la raison d’être d’un tronc commun, des programmes en ce sens au lieu d’en écarter les mathématiques. Deuxièmement, bon nombre d’élèves ne choisiront pas l’enseignement de spécialité de mathématiques, et on ne peut décemment pas les laisser quitter le lycée avec un petit niveau de Seconde, d’autant que certains en auront besoin pour passer des concours (administration, professeurs des écoles, …) et enfin parce qu’on ne peut pas laisser croire aux élèves que les sciences peuvent se construire sans les mathématiques.
Concernant les projets de programme, la commission Lycée a déjà soulevé des questions, émis des remarques et fait quelques propositions ; cependant, un fil rouge sur le forum de l’association est ouvert : alimentons-le de nos réflexions pour obtenir la meilleure vision d’ensemble sur laquelle l’APMEP pourra ensuite s’appuyer, que ce soit sur les contenus ou leur rédaction. Le fil rouge ne s’arrêtera pas avec la diffusion des programmes fin janvier. Vous n’aurez pas manqué de lire, par exemple, que chaque domaine mentionne de l’histoire des mathématiques, qu’on y parle de logique, de démonstration et d’algorithme… tant d’éléments dont nous n’avons pas forcément la formation initiale ou continue suffisante pour à la fois enseigner et évaluer.
Enseigner : ce fil rouge peut servir à échanger sur des pistes possibles, comme par exemple solliciter nos IREM et la commission Histoire des Mathématiques, mais aussi établir un état des lieux sur la formation continue à demander.
Évaluer : n’oublions pas que, dès janvier 2020, nos évaluations compteront pour l’obtention du bac 2021…
Et en parlant du bac, quid du mode examen pour la session 2019 ? Une lettre du bureau doit être adressée à la DGESCO pour savoir que répondre à nos élèves de l’année 2018-2019.
Et toujours en parlant du bac, mais de 2021 cette fois : quid du grand oral ? Silence dans les textes à ce jour.
Le tourbillon créé par cette réforme, qui encore une fois nous semble faite dans la précipitation, nous fait nous interroger sur l’actualité de 2018-2019 : doit–on cette année en Seconde anticiper sur le futur programme de Seconde et par exemple ne pas traiter la géométrie dans l’espace mais plutôt les taux d’évolution ? Un aménagement du programme de 1re à la rentrée 2019 est indispensable.
Cependant, ce tourbillon ne doit pas nous emporter, et de petites réflexions construites par chacun de nous peuvent aider à garder le cap, celui que nous tenons au quotidien devant nos élèves.
La commission Lycée est ouverte à tous les adhérents, elle a pour projet cette année de travailler sur trois pistes, en collaboration avec des membres des autres composantes de la CFEM :
- produire, en collaboration avec la communauté scientifique, un document d’aide aux collègues pour guider les élèves dans leur choix des trois spécialités en 1re : identifier les cursus ou formations post-bac qui nécessitent impérativement des mathématiques ;
- alimenter, en coordination avec le bureau et le comité, la discussion « fil rouge » ;
- en fonction des contenus (que nous n’avons pas à ce jour) de l’enseignement scientifique du tronc commun, produire, en collaboration avec la communauté scientifique, quelques ressources (activités, séances) pour les collègues amenés à intervenir dans cette discipline. N’hésitez pas à nous rejoindre !
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Contact : Frédérique Fournier
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