Journées de découverte
Jeunes Talents Mathématiques
Pour un bilan de dix années, dossier complémentaire
En complément de l’article Journées de découverte Jeunes Talents Mathématiques publié dans Au fil des Maths no 545, Jean Aymès nous livre la synthèse de dix années d’appel à candidatures, de sélection, puis du suivi systématique et méticuleux des cohortes de « Jeunes Talents » dans leur parcours scolaire et pour conclure quelques retours de ces « Jeunes « devenus adultes.
Jean Aymès
© APMEP Septembre 2022
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Les Jeunes Talents Mathématiques
Une implication des collèges et de leurs professeurs de mathématiques
Depuis 2011, 204 des 318 collèges de l’académie ont proposé des candidatures au moins une fois (64 %)
et parmi ceux-ci 23 ont participé au moins cinq fois.
Environ 55 collèges par an (selon les années de 40 à 62, sauf en 2020, seulement 19) proposent des candidats, pour une moyenne de 2 à 5 élèves par collège (sauf quelques collèges en proposant plus de 10).
Quelques collèges peuvent être qualifiés de fidèles (distribution figure 1). Pour eux l’opportunité est adaptée à leur contexte propre 1. La candidature procède d’un alliage : un contexte spécifique à des profils d’élèves identifiés, un engagement de professeurs pour aider à oser, une adhésion de jeunes, une volonté d’ouverture … Le rôle du professeur, souvent de plusieurs professeurs, parfois pas seulement de mathématiques, se concertant dans le collège autour de la candidature est certainement décisif.
Une candidature répondant au projet
Au cours des neuf années (2020 mise à part) 2, ce sont 200 candidatures par an en moyenne ; soit une candidature pour à peu près 140 élèves en Quatrième.
Le relevé de la candidature depuis 2011 s’établit comme suit :
Session | 2011 | 2012 | 2013 | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Collèges | 54 | 58 | 53 | 62 | 58 | 52 | 50 | 40 | 57 | 20 |
Candidatures | 169 | 183 | 220 | 240 | 199 | 248 | 144 | 169 | 214 | 68 |
Filles | 94 | 113 | 104 | 129 | 97 | 127 | 75 | 87 | 116 | 29 |
Taux Filles | 56 % | 62 % | 47 % | 54 % | 49 % | 51 % | 52 % | 51 % | 54 % | 43 % |
Bourses | 33 | 31 | 35 | 23 | 22 | 38 | 29 | 17 | 23 | 12 |
Taux Bourses | 22 % | 17 % | 16 % | 10 % | 11 % | 15 % | 20 % | 10 % | 11 % | 18 % |
Trois facteurs structurent la sélection au stage : la géographie scolaire, la place des jeunes filles, celle des boursières ou boursiers. Quel a été leur contribution dans la candidature ?
- Distribution géographique
Cette observation s’impose au vu de la configuration de l’académie 3. Ces candidatures proviennent systématiquement des huit départements, même si parfois pour certains départements l’effectif est assez faible (trois fois, deux candidatures par exemple). Leur distribution départementale se distingue clairement de la distribution départementale de la population scolaire. La part prise par les départements les moins peuplés, éloignés de la métropole régionale, Ariège (09), Gers (32), Hautes-Pyrénées (65) et dans une moins mesure Lot (46), est nettement majorée. L’implication des espaces plus ruraux se vérifie. - Filles et garçons
Le taux de jeunes filles en collège est environ 49 %. Cette proportion s’érode au cours du parcours dans les voies d’études scientifiques : 47,4 en Terminale S (RERS-2019 4), 42,5 en Terminale SVT- enseignement de spécialité mathématiques, 29,3 en Terminale SVT- enseignement de spécialité Informatique, 28,3 en Université Sciences fondamentales et applications, 31,2 en classe préparatoire aux grandes écoles scientifiques. De là un accent mis par le projet MathC2+ pour tenter de pallier un déficit essentiellement causé par des stéréotypes tenaces. Dans la candidature, la proportion de jeunes filles est légèrement supérieure à sa valeur globale pour les collèges. Cet écart a été nettement supérieur les deux premières années (nettement inférieur en 2020, aux circonstances très particulières). Avec cette répartition filles-garçons, l’intention d’adresse du stage aux jeunes filles semble bien prise en compte. - Bourses
L’attribution de bourse a été un indice retenu pour le choix, elle a quelque degré d’objectivité 5. Il y a environ 25,5 % de boursières ou boursiers en collège (donnée nationale RERS-2019) ; la classe sans élève boursier est rare 6. Capital socio-culturel et accomplissement dans les études ont été depuis longtemps reliés par la recherche sociologique ; le premier donnant un avantage avéré pour le second. Maintenant agissent des modes d’avantages pour les jeunes issus de « milieux favorisés » renforcés au travers de comportements nouveaux, de stratégies délibérées employées par certains milieux sociaux. Le capital socio-culturel inclut de plus en plus une compétence dans la compréhension du système éducatif qui contribue à le mieux utiliser. Dans la candidature au stage, selon les années, la proportion de bourses varie de 11 à 20 %.
Que cette proportion soit inférieure au niveau global moyen et qu’elle fluctue au cours des années est-ce très étonnant ? Pourrait-il y avoir davantage de propositions de cette sorte ? Y a-t-il une retenue dans l’incitation des professeurs envers les jeunes concernés ? Le caractère boursière ou boursier n’est pas secondaire au regard de cette action, c’est l’une des « cibles » de la « conquête de nouveaux territoires » sur laquelle le projet MathC2+ met l’accent. Ceci étant, on peut ne pas avoir de bourse et se trouver dans des conditions peu porteuses vers un horizon d’études supérieures scientifiques. L’état de l’École édition 2019 donne 36 % d’élèves d’origine sociale défavorisée en collège, puis 20 % en série générale scientifique au lycée (voir ici).
Globalement les candidatures sont en accord avec le propos du stage, ce qui rend le fait d’une sélection tout de même drastique d’autant plus préoccupant vis-à-vis de l’intérêt manifesté par ces jeunes7.
La sélection
Les moyens disponibles ont imposé un taux de retenu(e)s dépassant rarement 20 % des candidatures. Pour hébergement et encadrement agréés Jeunesse et Sport le coût dépend fortement de l’effectif 8. Le montage du financement est toujours incertain, avec des subventions relativement sûres (MathC2+ ou institutions scientifiques locales) mais ne suffisant pas, puis d’autres plus incertaines (notamment de conseils départementaux). L’ensemble fixe un format de stage ; généralement une décision de dernière heure.
La sélection depuis 2011
Session | 2011 | 2012 | 2013 | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Retenu(e)s | 22 | 22 | 28 | 28 | 28 | 28 | 31 | 34 | 36 | 24 |
Taux retenu(e)s | 13 % | 12 % | 13 % | 12 % | 14 % | 11 % | 22 % | 20 % | 17 % | 35 % |
Filles | 15 | 15 | 15 | 17 | 16 | 17 | 21 | 21 | 26 | 11 |
Taux Filles | 68 % | 68 % | 54 % | 61 % | 57 % | 61 % | 68 % | 62 % | 72 % | 46 % |
Bourses | 9 | 9 | 14 | 10 | 13 | 14 | 16 | 11 | 11 | 5 |
Taux Bourses | 41 % | 41 % | 50 % | 36 % | 46 % | 50 % | 52 % | 32 % | 31 % | 21 % |
La sélection renforce la proportion de jeunes filles, la plaçant en moyenne pour les neuf années à 63 %. La sélection renforce la proportion de boursières ou boursiers, avec 42 % en moyenne mais elle dépasse à peine 30 % en 2018 et 2019.
Depuis 2011, 126 collèges ont eu au moins un élève retenu (39 % des collèges) : 60 un seul, 25 deux, 20 trois, 8 quatre, 7 cinq, 2 six, 3 sept et 1 neuf. Une quinzaine de collèges ont eu au moins cinq participantes ou participants, cela du fait de la candidature à plusieurs sessions, de participations multiples pour une même session imposées par le profil des jeunes.
L’adhésion au suivi
En suivi du stage à l’année \(n\), il y a Suivi 1 à l’année \(n+1\) (Troisième) et Suivi 2 à l’année \(n+2\) (Seconde). Depuis le début, une liste supplémentaire a permis de réagir aux rares retraits avant le premier stage. À partir de 2015, au vu du nombre important d’abandons pour le premier suivi en 2014, cette liste a servi à associer de nouvelles ou nouveaux élèves au deuxième stage, tout à fait ravis, tout à fait à leur place, très facilement intégrés 9. On peut donc être « Jeune Talent Mathématiques » par une entrée en Quatrième ou bien par une entrée en Troisième.
Session | 4 an \(n\) | Trois sessions | Entrants 3 | Suivi 1 an \(n+1\) | Deux sessions |
---|---|---|---|---|---|
2011 | 22 | 11 | 19 | 8 | |
2012 | 22 | 13 | 17 | 5 | |
2013 | 28 | 15 | 20 | 5 | |
2014 | 28 | 10 | 14 | 10 | |
2015 | 28 | 15 | 3 | 24 | 9 |
2016 | 28 | 16 | 4 | 26 | 13 |
2017 | 31 | 13 | 5 | 26 | 11 |
2018 | 34 | 15 | 8 | 27 | |
2019 | 36 | 3 | 34 |
Celles ou ceux ne participant pas au suivi, ou bien abandonnent ou bien sont indisponibles et reparticipent en Seconde. Les raisons d’abandon ne sont pas toujours données et lorsqu’elles le sont il s’agit essentiellement de voie d’orientation choisie. Parfois les correspondances restent sans réponse 10.
Le taux d’abandon total, par année, s’établit de 14 à 43 %, très fluctuant donc. Qu’en retenir ?
1. Les filles abandonnent plus souvent que les garçons.
En neuf ans, 42 filles sur 162 (26 %) ont abandonné et 17 garçons sur 94 (18 %).
2. Les boursières ou boursiers abandonnent moins.
22 boursières ou boursiers ont abandonné sur les 106 retenu(e)s au cours de neuf années, soit 20,7 %. Alors qu’il y a 37 abandons parmi les sans bourse, soit 25 % (27 jeunes filles sur 99, soit 27 % et 9 garçons sur 50, soit 18 %). Pour les garçons, être ou ne pas être boursier ne semble pas jouer dans l’abandon. En revanche, la non boursière abandonne un peu plus souvent que la boursière. Même à petits effectifs cette observation serait à prendre en compte pour l’avenir.
Le tableau ci-dessus donne aussi le nombre de sessions suivies. L’entrée dans le parcours en fin de Troisième, depuis 2015 et jusqu’en 2019, a concerné 23 élèves : 9 jeunes filles (dont 2 boursières) et 11 garçons (dont 3 boursiers). Malgré ce petit nombre on peut observer que : 13 ont participé aux deux stages (Troisième et Seconde, pour 2018, seulement inscrits, le stage est en attente) soit plus de la moitié. Là encore l’abandon après le premier stage est le fait de 3 jeunes filles (un tiers) et de 4 garçons (plus d’un tiers), un peu plus important donc. Cependant, tous ces abandons sont sans bourse, aucune boursière ou boursier parmi les entrants par liste supplémentaire n’a abandonné.
D’année en année, le taux d’abandon des boursières ou boursiers varie de 9 % à 50 %.
3. Les abandons selon les départements :
Département | Ariège | Aveyron | Hte-Gar. | . Gers | Lot | Htes-Pyr. | Tarn | Tarn-et-Gne. |
Taux aband. | 35 % | 14 % | 24 % | 19 % | 22 % | 32 % | 24 % | 16 % |
Le taux moyen d’abandon (2011 à 2019) vaut 23 % ; Ariège et Hautes-Pyrénées sont au-delà, Aveyron et Tarn-et-Garonne en deçà. L’éloignement géographique explique incomplètement ce résultat. Les trois premiers de ces quatre départements peuvent être considérés comme éloignés, le Tarn-et-Garonne bien moins, le Lot plus nettement éloigné.
D’autres éléments entrent en jeu. Ainsi le fait de vouloir participer avec un ou une camarade du même collège ; cela a pu jouer parfois, un abandon en entraînant un autre. Pour autant qu’on puisse l’avérer, ceci interférerait avec les interprétations précédentes : accentuation de l’abandon des jeunes filles, accentuation pour 2018.
Le camp d’été universitaire, de cinq jours, a eu lieu en 2015, 2016, 2017, 2019 ; 12 « Jeunes Talents » ont participé (une jeune fille boursière trois fois et un garçon deux fois), dont 7 jeunes filles et 4 boursières, 2 boursiers.
Le parcours scolaire et étudiant
Les 163 jeunes des générations 2011 à 2016 ont atteint le baccalauréat ; on dispose des résultats à l’examen ainsi que, dans la mesure du possible, de la voie d’étude commencée dans l’enseignement supérieur.
Résultats au baccalauréat
Le résultat au baccalauréat est relevé sur le site de l’Académie dans la période de publication (sauf rares cas particuliers). La génération 2016 a vécu en 2020 le dernier baccalauréat par séries (ainsi que la situation sanitaire dégradée). Les Jeunes Talents Mathématiques se sont répartis dans diverses séries : séries générales telles que Économique et Sociale, Littéraire, Scientifique Sciences de l’Ingénieur ou Scientifique Sciences de la Vie et de la Terre, séries technologiques telles que Sciences et Technologies de l’Industrie et du Développement Durable, Sciences et Technologies de la Santé et du Social, Sciences et Technologies de l’Hôtellerie et de la Restauration, Sciences et Technologies du Design et des Arts Appliqués.
Ce baccalauréat peut comporter l’indication « section européenne » . Le tableau ci-dessous donne les résultats par série, mention, avec éventuellement « section européenne » . Le résultat n’est pas connu pour seulement 9 jeunes sur 163, probablement des changements d’académie.
Détail des résultats au baccalauréat
Par série avec section européenne éventuelle :
JTM 2011 à 2016 (163 jeunes) | TB | Europ. | B | Europ. | AB | Europ. | Admis | Europ. | Total | Refusé |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Inconnu | 9 | |||||||||
ES | 5 | 3 | 6 | 1 | 2 | 0 | 2 | 1 | 15 | |
L | 8 | 3 | 0 | 0 | 1 | 0 | 3 | 1 | 12 | |
S-SI | 6 | 2 | 5 | 0 | 6 | 0 | 1 | 1 | 18 | |
S-SVT | 38 | 16 | 28 | 4 | 28 | 4 | 10 | 0 | 104 | 1 |
STI2D | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 | 0 | 1 | |
ST2A | 1 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 | |
STHR | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 1 | |
ST2S | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 1 | |
Total | 58 | 25 | 39 | 5 | 39 | 4 | 17 | 3 |
Un seul échec, 37,5 % de mentions très bien, plus de deux fois plus qu’au plan national. Très bons élèves lors de leur entrée dans le parcours J.T.M., ils le sont restés ! On attend ces « Jeunes Talents Mathématiques » du côté des sciences : 75 % obtiennent un baccalauréat scientifique (64 % S-SVT, 11 % S-SI) ; dont 60 % section européenne. On note 12 lauréates et lauréats en L avec 8 mentions très bien, ce qui dénote un choix d’excellence déterminé.
Après le baccalauréat
1. Un enjeu de conquête de nouveaux territoires.
Le projet MathC2+ veut agir sur l’insuffisance en étudiants post-bac, qu’ils se destinent à devenir professeurs de mathématiques en collège ou lycée ou qu’ils accèdent aux multiples carrières mathématiques ou informatiques. L’un des indicateurs critiques représentatif réside dans la situation des candidatures au CAPES de mathématiques telle que les rapports publiés du concours la donnent (voir figure 2, source : https ://capes-math.org) .
Le fléchissement du nombre de candidats sur la période, brutalement accentué avec la réforme du recrutement des enseignants dite de « masterisation » en 2011, relative stagnation sur les années récentes sans que soit retrouvé un régime satisfaisant. Depuis 2011, ceci induit une vacance de postes, non attribués au terme du concours 11. Une hypothèse du projet MathC2+ est de susciter des candidatures non traditionnelles 12, un enjeu de « conquête de nouveaux territoires » selon l’expression imagée du projet.
2. Entrée en post-bac des « Jeunes Talents Mathématiques » de 2011 à 2016.
Obtenir par voie administrative les informations sur les voies d’études après le baccalauréat (première année) étant impossible, il a fallu enquêter directement auprès des jeunes.
55 jeunes n’ont pas répondu, c’est 34 % d’inconnu (près de 3 jeunes filles sur 10, plus de 4 garçons sur 10, 4 sur 10 pour celles ou ceux ayant une bourse en Quatrième).
Environ 45 libellés pour les 108 réponses obtenues sont recensés ! Les associant dans une acception très large, on a des regroupements : des formations liées aux arts, à l’agronomie et apparentés, au commerce et administration, aux lettres, histoire et sciences humaines, au médical, les D.U.T. Sciences, licences de Biologie, Sciences de la Vie et de la Terre, de Physique, Chimie, de Mathématiques, leurs parcours spéciaux éventuels, classes préparatoires aux grandes écoles MPSI, PCSI et PTSI, école d’ingénieurs. Comme les réponses sont parfois assorties de commentaires (quelques propos sont en partie 5 ci-dessous) 13, on perçoit un choix mis en perspective, réfléchi, (ce qui n’a rien d’étonnant !) :
– description du parcours envisagé sur plusieurs années avec un horizon professionnel, il y a un projet explicite ;
– expression de positionnement par rapport au vécu, appréciation d’un apport, expression d’une distance prise. Mobilisés sur leur motivation première, ils ne regrettent pas d’avoir vécu cette expérience ;
– un choix d’excellence, probablement parmi divers possibles. À titre d’exemple, trois jeunes filles optant pour CPGE Chartes (deux série L TB Européenne, une série ES B), assidues et brillantes lors des Journées de découverte dont une ayant participé, après sa Terminale, au Camp d’été CIMI (cinq jours sur l’intelligence artificielle).
Entrés dans le parcours en Quatrième, la latitude des choix de ces collégiennes et collégiens est ouverte. Les abandons en cours de parcours l’indiquent, ceux-ci plus nombreux dans les voies les moins scientifiques que dans les plus scientifiques. Pas complètement cependant, par exemple 6 sur les 10 optant pour Lettres, Histoire, Sciences Humaines ont participé aux huit jours de l’action.
Le but était d’agir à ce niveau de Quatrième où commencent à se jouer des choix importants afin d’espérer un infléchissement. Ce but est-il atteint ? Certainement un peu, avec un manque persistant. Outre l’inconnu pour celles ou ceux qui n’ont pas répondu, un indice de ce manque réside dans le regroupement le plus nombreux, celui des voies médicales : 16 jeunes dont 13 PACES (PASS depuis 2020), 13 jeunes filles dont 2 boursières, 4 garçons non boursiers et 8 mention TB S-SVT (3 Européenne) , 5 B S-SVT, 2 AB S-SVT Européenne.
D’autre part, pour D.U.T. Sciences (Génie Civil, Génie Mécanique et Productique, Génie Biologique, Mesures Physiques, Informatique), 5 garçons et 2 filles, un choix « classique » de phase propédeutique semble opérer : quatre indiquant que leur projet est de poursuivre ensuite soit vers une licence, soit vers une école d’ingénieurs. Cette poursuite d’études est-elle à même de contribuer un tant soit peu aux buts MathC2+ ?
Le graphique figure 3 visualise la distribution en pourcentage des filles, des garçons, des 163 J.T.M., par voie d’études.
On y retrouve, quantifiée, la dispersion des choix. Ce bilan demeure inscrit dans les tendances dominantes – que l’on sait lourdes depuis des dizaines d’années, cibles de cette action – au regard des choix des jeunes filles. Par exemple : leur proportion nettement plus élevée que celle des garçons en Commerce et Administration, Lettres, Histoire et Sciences Humaines, Médical. Ou bien dans le domaine des Sciences plus portées vers la Biologie, l’Agronomie contre l’inverse en D.U.T. Sciences, Licence Mathématiques, CPGE PTSI, PCSI, MPSI.
3. Les choix de voies scientifiques
38 jeunes (sur 163, dont 55 non réponses) ont choisi les voies les plus scientifiques soit 23 %. Ce nombre reste grevé par l’observation précédente, mais détaillons davantage. Avec les abréviations : Eff., Fi. B., G. B. pour respectivement Effectif, Filles Boursières, Garçons Boursiers.
Dans ce groupe des choix les plus scientifiques :
- 17 jeunes filles sur 38, avec 59 % de filles dans la population des 163,
- 19 bourses (en classe de Quatrième) sur 38, avec 44 % de boursières ou boursiers dans la population des 163.
Ce bilan est à remarquer !
Précisons la répartition en termes d’origine géographique lors du collège : les mentions LM, LPC pour licence de Mathématiques et apparentées, respectivement Physique Chimie et apparentées puis MP, PC, PT pour classes préparatoires, Ing. pour école d’ingénieurs. Trois entrent en parcours spécial en licence, signalés par une étoile. Les soulignés indiquent une bourse en Quatrième, 21 en tout, plus de 50 % dans ce regroupement de voies d’études.
32 collèges d’origine sont concernés, 19 peuvent être qualifiés de ruraux (en gras dans le tableau), deux collèges sont en zone d’éducation prioritaire, les autres plus proches des préfectures ou en préfecture ou sur les grands axes routiers rayonnant vers Toulouse.
Ce constat d’un flux favorable et modéré vers les voies scientifiques est consolidé par sa teneur liée à l’implication sur l’étendue du territoire, ainsi qu’à celle des titulaires de bourse (en Quatrième), deux intentions de ce projet.
Là encore est-ce « ++ » par rapport à ce qui serait sans existence de MathC2+ ?
Quelques vues des moments de la recherche
Recherche en groupe puis exposé de travaux et discussion sur ceux-ci.
Journée « jeux combinatoires » : étude du jeu de pavage, étude de jeux de Nim, jeu de Sprouts, mise en évidence de coups gagnants.
Journée « balles et ballons » : sphères et polyèdres, pourquoi cinq polyèdres réguliers ? Quel ballon pour la coupe du Monde de football en un minimum de pièces ? Quelle pièce de feutre pour recouvrir la balle de tennis ? La balle de golf est-elle un polyèdre ?
Recension des interventions sur les dix années
Interventions universitaires
Thèmes et intervenants depuis 2011 pour le stage JTM année n (entrants Quatrième)
• 2011- « Pavages, empilement et motifs géométriques » , Xavier BUFF
• 2011- « Codages et cryptographie » , Marc PERRET
• 2012- « Graphes, quelques problèmes résolus ou à résoudre, nouveaux horizons mathématiques » , Etienne FIEUX
• 2012- « Systèmes dynamiques » , Lubomir GAVRILOV
• 2013- « Pavages : comment carreler une surface courbe ? » , André LEGRAND
• 2013- « Comment peut-on » ; mesurer » ; la dimension ? » , Anthony QUAS, Professeur à University of Victoria
• 2014- « Jeux combinatoires » , Loïc CELLIER et Nil VENET
• 2014- « Balles et ballons » , Xavier BUFF
• 2015- « Isopérimétrie » , Fanny DELEBECQUE
• 2015- « Nœuds et tresses » , Joan MILLÈS
• 2016- « Jeux combinatoires » , Dominique BAKRY
• 2016- « Informatique et robotique » , Jean-François PARMENTIER, Olivier GASQUET, Philippe TRUILLET
• 2017- « Poulies et engrenages » présentation et animation, Xavier BUFF
• 2017- « Permutations » , Arnaud CHERITAT et Jordi CANELA SANCHEZ
• 2018- « Polyominos » , Damien BOULOC
• 2018- « Géodésie » , Yohann GENZMER
• 2019- « Nombres (ir)rationnels et fractions continues » , Jasmin RAISSY
• 2019- « Géodésie » , Yohann GENZMER
Thèmes et intervenants depuis 2011 pour le stage JTM année n+1 (suivi en Troisième)
• suivi 2011- A propos de mathématiques et d’Industrie ; aperçu d’ensemble, quelques problèmes de réseaux, cryptographie, conception d’un avion, Mohamed MASMOUDI, Matthieu MEAUX, Ingénieur de recherche EADS IW, Sébastien VALETTE, Ingénieur de recherche CNES/THALES Labs ; illustrations et témoignages exemples de recherches, vécu de professionnels …
• suivi 2012- « Les métiers de l’aéronautique » , intervention du Consortium « Fly Higher » , Célia MARTINIE, Chercheuse à l’I.R.I.T., Professeur à l’U.P.S. et « Utilisation des mathématiques pour répondre à des problématiques industrielles » , Jean-Michel LOUBES
• suivi 2013- « Utilisation des mathématiques pour répondre à des problématiques industrielles » , Jean-Michel LOUBES et « Exemples de projets inter-disciplinaires associant les mathématiques » Sébastien DEJEAN
• suivi 2014- « Comment les mathématiciens ont inventé l’ordinateur » , Denis KUPERBERG et « Math., Stat. et Big Data » , Jean-Michel LOUBES
• suivi 2015- « Cryptographie » présentation et animation, Marc PERRET
• suivi 2016- « Surprises probabilistes à propos de jeux de cartes » , Clément SIRE
• suivi 2017- « Polyominos » , Damien BOULOC
• suivi 2018- « Fractions continues » , Jasmin RAISSY
Thèmes et intervenants depuis 2011 pour le stage JTM année n+2 (suivi en Seconde)
• suivi 2011- participation au colloque Maths en Jeans
• suivi 2012- « Jeux combinatoires » , Dominique BAKRY
• suivi 2013- « Polyèdres » , Dominique BAKRY
• suivi 2014- « Billards » , Xavier BUFF
• suivi 2015- « Cartographie » , Xavier BUFF
• suivi 2016- « Modèles mathématiques pour l’astronomie » , Xavier BUFF
• suivi 2017- « Dites, c’est quoi une matrice ? » , Mohamed MASMOUDI
Des concours bénévoles précieux
La coordination générale aussi bien que la tenue d’ateliers résolution de problèmes, de veillées de jeux mathématiques, doivent beaucoup à :
Bernard VIDAL, professeur de mathématiques, I.R.E.S. de Toulouse
Xavier BRESSAUD, professeur d’Université I.M.T., initiateur de la caractéristique recherche de l’action
Véronique LIZAN, maître de conférences INSPÉ Toulouse, association femmes et mathématiques
Frédérique FOURNIER, professeure de mathématiques, régionale A.P.M.E.P.
Gérard MARTIN, professeur de mathématiques honoraire, I.R.E.S. de Toulouse
François BOUCHER, professeur de C.P.G.E.
Jean-François BERGEAUT, professeur de mathématiques, INSPÉ Toulouse, régionale A.P.M.E.P.
Arrivés en post-bac, ils s’expriment
Quelques commentaires sur le choix d’études …
• Des projets mûris
Jeune fille mention bien ES, CPGE ECE : Je me dois de vous répondre vu la formidable expérience passée à vos côtés. (CPGE ECE pour) intégrer l’école de commerce de mon choix. Ce choix me permet également de développer des méthodes de travail uniques et d’augmenter mes connaissances de manière considérable tout en me laissant encore 2 ans pour bien être sur de mon choix qui est l’école de commerce.
Jeune homme mention très bien S-SI : INSA, et je me projette dans la mécatronique, pour ensuite peut-être devenir ingénieur robotique.
Jeune homme mention très bien section européenne S-SVT : J’ai choisi de faire une licence de mathématiques à l’université Paul Sabatier. Quant à mon avenir professionnel je ne sais pas trop encore mais j’aimerais me diriger vers un métier comme actuaire.
• Des jeunes mobilisés sur leur motivation profonde, ils ne regrettent pas d’avoir vécu cette expérience.
Par exemple, cette jeune qui après le baccalauréat L mention Très Bien choisit un CAP Pâtissier et dit : je me suis beaucoup éloignée des sciences et ai suivi mon rêve de toujours.
Ou cette autre mention Bien série S-SVT : Je m’oriente vers une première année de licence Gestion, à la TSM. Je déciderai de la voie professionnelle que j’arpenterai une fois mon master choisi. Merci pour ce suivi et cette expérience mathématique que vous nous avez offerts durant ces dernières années.
Ou cette autre ayant choisi ST2DA en lycée, baccalauréat TB Européenne, dont la maman dit : A. était autant passionnée de mathématiques que de dessin … elle a choisi les arts plastiques ! ! … (au grand désespoir de son professeur de math et de son grand père …). En Seconde elle a été prise au lycée d’art appliqué Les Arènes à Toulouse. Elle a eu son bac avec mention, puis a été prise aux arts déco de Strasbourg en section illustration. Elle est en deuxième année et se régale. Ce serait intéressant de faire un parallèle entre le dessin et les maths ! Dans les deux cas ce sont des chercheurs…
Un jeune homme, S-SVT Bien : J’ai réussi ma L1 Sciences fondamentales Mathématique à l’Université Paul Sabatier à Toulouse ; actuellement toujours dans cette université en L2 mathématiques option Algorithmique. Mon projet étant toujours de devenir enseignant en mathématiques.
Ou encore après un baccalauréat S-SVT TB Européenne, une jeune femme : À la suite des Jeunes Talents Mathématiques, j’ai gardé un goût prononcé pour les maths et les sciences en général. C’est pourquoi, j’entre l’année prochaine en première année en prépa MPSI (maths physique science de l’ingénieur) au lycée Pierre de Fermat à Toulouse. Cela me permettra de tenter les concours aux grandes écoles, même si je n’ai pas de préférence quant aux choix de l’école d’ingénieur pour l’instant. Je vous remercie de m’avoir permis de participer trois années consécutives aux stages des Jeunes Talents Mathématiques, j’en garde de bons souvenirs ainsi qu’une ouverture d’esprit scientifique qui, j’espère, me sera bénéfique dans les années à venir.
- Conscience de la situation sociologique locale ou perception d’une distance à traiter, comme le dit un professeur : nos élèves ne rencontrent que très rarement l’occasion d’appréhender la réalité des métiers scientifiques.
- L’appel à candidature sitôt adressé, l’accueil des élèves dans les collèges a été interrompu mi-mars 2020. Malgré les tentatives d’organisation retardée, la réouverture de l’université fin août, le montage d’un stage fin août, celui-ci a été annulé.
- 400 km de diamètre, hétérogène avec un département très peuplé (46 % de la population collège-lycée en Haute-Garonne, essentiellement aux alentours de Toulouse, grande métropole) et sept départements bien moins peuplés, moins drainés de science, avec de vastes espaces ruraux, éloignés.
- Repères et références statistiques-2019 https ://www.education.gouv.fr/reperes-et-references-statistiques-sur-les-enseignements-la-formation-et-la-recherche-2019-3806.
- La bourse est attribuée par l’académie sur constitution de dossier prenant en compte notamment les ressources et le nombre d’enfants à charge.
- Á distribution aléatoire (ce qu’elle n’est pas tout à fait) il y a moins d’une chance sur 1000 pour qu’il n’y ait pas de boursier dans une classe de 25 élèves.
- Depuis 2018, une journée spécifique est proposée à l’automne pour ceux qui ne sont pas retenus, environ 25 y participent.
- Pour un groupe de 36, le coût moyen par jeune est de l’ordre de 70 euros par jour.
- Le vivier des candidatures est clairement riche en talents.
- Correspondance essentiellement par courriel, par courrier, parfois par téléphone avec la famille, le jeune ; l’expérience montre que sans assiduité le contact est menacé de se perdre.
- Ce qui ne signifie pas des classes sans professeur puisqu’on a recours à des non-titulaires, éventuellement non admis !
- Il y a d’autres hypothèses : par exemple ce qui fait la valeur du métier, son positionnement par rapport à d’autres à formation équivalente ou ce qui fait davantage de réussite dans les études universitaires…
- C’est le bénéfice de l’enquête directe.
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