Une sortie au salon Culture et jeux mathématiques

Sortir au Salon des maths avec vos élèves ? Vous avez déjà franchi le pas ou hésitez encore ? Isabelle Audra partage son expérience.

Isabelle Audra

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Christine Oudin, membre du groupe JEUX de l’APMEP m’a fait découvrir le Salon des mathématiques. Naturellement, j’ai pensé que cela pouvait intéresser mes élèves de Quatrième, éventuellement de Troisième. C’est ainsi qu’en 2011, sans jamais l’avoir visité moi-même, j’y ai emmené des classes. Convaincue par l’expérience, nous y sommes allés depuis tous les ans jusqu’en 2017, en impliquant rapidement tout le niveau Quatrième. La très grande diversité des stands est un atout indéniable.

Expérience

Au fil du temps, nous avons cumulé beaucoup de souvenirs et d’anecdotes. En effet, emmener tout un niveau occasionne quelques moments amusants, épatants même et le plaisir se retrouve autant du côté des accompagnateurs que des élèves ! Une professeure de français me parle encore de l’atelier dédié à la dentelle du Puy ; un élève plutôt difficile a joué des heures durant aux échecs (avec l’approbation de l’animateur) ; ou encore la fois où j’ai eu toutes les peines du monde à récupérer un groupe qui réalisait une grande fresque et voulait bien sûr la continuer (tout comme les animateurs qui voulaient les garder encore un peu) alors qu’il était grand temps de partir… Je me souviens aussi d’une collègue partageant sa grande satisfaction à l’issue d’une « si bonne journée avec des élèves charmants et intéressés », sa réflexion me renvoyant immédiatement au fait que parmi eux, cinq élèves étaient inscrits dans notre établissement à la suite d’un conseil de discipline et que j’avais eu bien raison d’emmener tout le monde.

Malgré les difficultés rencontrées dans l’organisation de 2017, quel souvenir précieux que cette élève « fâchée » dirons-nous avec les mathématiques, assise à mes côtés au fond du car lors du retour et s’extasiant à plusieurs reprises sur sa journée ; elle n’était pas la seule ! La semaine qui a suivi, le ravissement a perduré et j’ai connu avec sa classe, très difficile, une sorte d’heure de gloire, un moment d’apaisement et de confiance. Fin mai, début juin cela n’a pas de prix… Une année, un groupe de filles très studieuses est venu me trouver : elles venaient de jouer à Détective Mathéo. Elles tenaient absolument à ce que je vienne rencontrer son créateur qui était présent et que j’achète ce jeu qui leur avait tellement plu pour le collège. Certes, ces élèves-là aimaient déjà les mathématiques, mais elles ont fait preuve de beaucoup de curiosité et d’autonomie.

2020, année particulière

En 2020, le Salon n’a pas eu lieu en présentiel, j’ai tenté de faire participer mes élèves à certaines sessions à distance mais le cheminement s’est avéré trop difficile pour eux. Néanmoins, de mon côté, j’ai pu y faire quelques (re)découvertes que j’ai utilisées lorsque nous nous sommes retrouvés en classe au moment du déconfinement. Seuls les Sixièmes et Cinquièmes sont d’abord revenus. Leurs emplois du temps avaient été remaniés : nous les avions 7 heures par semaine, dont trois fois deux heures de suite. Nous avons réfléchi à l’organisation de ces blocs de deux heures. Certains élèves sont ainsi devenus des inconditionnels de Mathador chrono et du jeu Tasuko.

2022, de retour place Saint-Sulpice

J’y ai emmené trente-deux élèves de Quatrième et Troisième pour le plaisir de tous ! J’ai réservé des ateliers très connus, celui des « Récréations mathématiques » du Palais de la découverte, celui du groupe Jeux de l’APMEP mais aussi celui sur le Rulpidon découvert grâce à « Maths en scène » lors des JAIME 2021 ou encore un atelier dédié à l’orientation dans le domaine des mathématiques. Venue avec moins d’élèves et donc moins d’accompagnateurs, il a été plus difficile de confier des groupes à certains stands mais dans l’ensemble tous nos élèves ont pu découvrir les mathématiques sous de nombreux aspects.

Du côté de l’organisation… sortir à Paris n’est pas si simple !

Comme tout autre évènement, une sortie au Salon ne s’improvise pas. Il faut préparer ses groupes très soigneusement car il est impossible d’encadrer chaque groupe de huit élèves par un seul accompagnant adulte. Nous pouvons réserver par groupe un atelier le matin et un l’après-midi. Il faut donc parvenir à trouver d’autres ateliers ou animations pour, entre guillemets, rentabiliser la journée. Nous nous efforçons de choisir des ateliers différents afin de surprendre, d’éveiller la curiosité et l’envie des élèves.
Les sorties d’une journée à Paris sont impactées par le temps passé dans les transports. Le collège est à environ 130 km de Paris. Nous avons essayé de partir avant 8h mais cela ne changeait quasiment rien à notre heure d’arrivée et était bien gênant pour nos élèves transportés. Alors nous sommes partis régulièrement à 8h du matin. Au début, nous arrivions vers 10 h 30 et les dernières années 11 h 30. Et puis pour rentrer à une heure raisonnable, il faut reprendre le car vers 16h15 maximum… Heureusement, la traversée de Paris par les quais séduit toujours les élèves : ceux qui n’y sont jamais allés comme ceux qui ont vécu en région parisienne avant de se retrouver dans notre département. Ce long périple explique que nous tenons à être rentables une fois sur place. Notre idée est donc de maximiser le nombre d’ateliers et d’activités.
Évidemment, si nous avons aussi longtemps organisé ces sorties, c’est bien qu’elles en valaient la peine et à bien des égards. Et pourtant, en dehors de la durée totale du déplacement, il faut aussi parvenir à convaincre les élèves de participer à cette sortie payante, donc facultative, rester calme face au manque de curiosité et aux a priori concernant les mathématiques, lutter contre l’envie de rester chez soi car « le reste de la classe ne sera pas au collège alors pourquoi j’irais », persuader les familles récalcitrantes et bien d’autres autres tracasseries encore… Mais ça vaut le coup ! Et quand je croise des anciens élèves, ils ont spontanément un souvenir à partager sur ces moments mathématiques.

Les maths, c’est la vie !

J’ai aussi bien d’autres idées en tête et d’autres lieux me tentent : faire découvrir aux élèves le Palais de la découverte rénové¹ et l’Institut du monde arabe à Paris (les pavages me passionnent) ou l’Alhambra de Grenade que le programme Erasmus+ en cours d’élaboration me permettra peut-être de mettre en place.
Et puis, sortir de la classe, parfois ce n’est pas aller bien loin : depuis deux ans, le professeur d’arts plastiques et moi-même avons investi le grand garage à vélo et deux classes de Quatrième par année scolaire décorent des pans de murs. Évidemment les pavages sont à l’honneur et nous en avons pour quelques années encore…

Un autre projet lié à la semaine des mathématiques 2022 a emmené une classe de Sixième au gymnase travailler les premiers éléments de géométrie et les déplacements avec leur professeur d’EPS².

Pour une conclusion en forme de clin d’œil, s’évader de la classe ne nécessite pas forcément d’en sortir… la lecture de La faiseuse de neige de Marie Lhuissier³ est une belle invitation à l’évasion puis à la création.